11,6 millions d’euros. Telle est la somme que Courbevoie doit débourser pour financer de nouveaux prélèvements obligatoires de l’État. Ce montant vous semble considérable ? Il l’est en effet pour une ville comme la nôtre, dont les dépenses réelles de fonctionnement augmentent ainsi de 5,6 %. C’est dans cette perspective préoccupante qu’a été adopté, lors
du conseil municipal du 7 avril, le budget de notre commune pour 2025.
Cette année, le vote est intervenu inhabituellement tard, en raison du contexte incertain lié à la mise en œuvre de dispositions légales inédites et de l’instabilité politique nationale. Les efforts supplémentaires que l’État exige de la part des collectivités territoriales, sommées de contribuer au redressement des finances publiques, constituent un nouveau coup dur après la crise du Covid et les conséquences financières de l’inflation sur les fluides et les denrées, qui avaient grevé les précédents exercices. Pour autant, la ville a réalisé le tour de force de boucler son budget 2025 sans recourir au levier fiscal.
Trois contraintes conjoncturelles

1. La création par l’État d’une réserve de précaution (3,8 M€)
Fondé par l’article 64 de la loi de finances 2025, le dispositif de lissage conjoncturel des recettes fiscales des collectivités territoriales (Dilico) vise à constituer un fonds constant d’un milliard d’euros, auquel doivent contribuer quelque deux mille communes, intercommunalités, départements et régions, selon leur potentiel fiscal. En l’espèce, Courbevoie a écopé du taux de prélèvement maximal, soit 2 % de ses recettes réelles de fonctionnement ! Le montant qu’elle versera en 2025, soit 3,8 M€, correspond à sa contribution initiale. Les années suivantes, les participations dues devraient être plus modestes.
2. Le relèvement du taux de cotisation patronale à l’assurance vieillesse (1 M€)
Afin de préserver l’équilibre d’un système précaire, la loi de financement de la Sécurité sociale 2025 prévoit d’augmenter de trois points, pendant quatre ans, le taux de cotisation des employeurs territoriaux à la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales (CNRACL). Celui-ci passera donc de 31,65 % en 2024 à 34,65 % en 2025, pour atteindre 43,65 % en 2028. Ceci représente un coût additionnel pour la ville d’un million d’euros tous les ans pendant quatre ans.
3. L’explosion de la péréquation (25,5 M€)
La péréquation est un mécanisme financier qui consiste à prélever un pourcentage des ressources de certaines communes, redistribué aux villes moins favorisées, afin d’assurer l’égalité entre les territoires. Dans ce cadre, notre ville contribue au Fonds de solidarité des communes de la région Île-de-France (FSRIF) et au Fonds national de péréquation des ressources intercommunales et communales (FPIC). Depuis 2016, par décision du législateur, les collectivités de la métropole du Grand Paris bénéficiaient d’un mode de calcul dérogatoire pour ce dernier. Or, en 2025, le prélèvement au titre du FSRIF accuse une hausse naturelle qui la porte, au total, à 16,7 M€, alors que celui du FPIC connaît une hausse exceptionnelle de 5,9 M€ par rapport à 2024, soit un total de 8,8 M€ ! Cette augmentation drastique est due à l’abrogation du mécanisme dérogatoire décidée par le Conseil constitutionnel et entérinée par la loi de finances 2025, en dépit des actions de sensibilisation déployées par les élus locaux (lire encadré ci-dessous).

Dix mois de mobilisation
Le 24 avril 2024, à la demande de la ville de Saint-Cloud, le Conseil constitutionnel a abrogé le mode de calcul dérogatoire du FPIC pour les communes de la métropole du Grand Paris à compter du 1er janvier 2025. Il restait alors huit mois à notre municipalité pour préparer un budget grevé de plusieurs millions d’euros. Jacques Kossowski, maire de Courbevoie, s’est investi sans relâche afin de sauvegarder les finances communales, plaidant notamment la cause de notre ville auprès du président de la commission des Finances de l’Assemblée nationale, Éric Coquerel (lui-même courbevoisien de naissance !). Si l’amendement défendu par notre maire a bien été approuvé en commission avec les voix de la gauche, de la droite et du centre, la censure du gouvernement de Michel Barnier en a compromis l’adoption définitive, notamment au Sénat. Malgré les alertes réitérées des responsables de collectivité, ni cette alternative ni les autres solutions proposées n’ont été retenues. La loi de finances, votée le 14 février dernier, a avalisé la position du Conseil constitutionnel, sanctionnant une hausse sans précédent de la participation de Courbevoie à la péréquation.
Des charges incontournables


Outre l’alourdissement massif des contributions obligatoires évoquées plus haut, la ville doit faire face à l’augmentation de ses dépenses locales, essentiellement due à des facteurs externes.
• La masse salariale : bien que la ville n’ait pas créé de nouveaux postes depuis 2020, la masse salariale subit une croissance automatique sous l’effet conjugué de la majoration du point d’indice par décret de l’État, des mesures réglementaires d’évolution de grades, de la hausse du taux de cotisation à la retraite des fonctionnaires (cf supra) et du bonus attractivité voué à favoriser les recrutements dans les secteurs « en tension » (notamment la petite enfance), en partie subventionné par la Caf.
• Les fluides : après plusieurs années d’inflation (de 5,2 M€ en 2022 à 10,5 M€ en 2023), les coûts de l’énergie se stabilisent (9,3 M€ prévus au budget 2025), mais constituent toujours une charge élevée pour la collectivité.
Des services préservés
Pour compenser cette pression financière, la ville dispose d’un atout majeur : sa pratique budgétaire, fondée sur une gestion rigoureuse et des démarches proactives. C’est à ce prix que les Courbevoisiens continuent de profiter d’une haute qualité de service.
• Le soutien aux associations : les élus ont souhaité maintenir cette année le niveau de contribution de la commune au fonctionnement des associations courbevoisiennes, indispensables au dynamisme local et au lien social. En 2024, 140 d’entre elles ont bénéficié d’aides de la mairie (4 M€ de subventions et 2,3 M€ de mise à disposition de locaux).
• Les participations au Val (Vacances, animations, loisirs), à la cantine et au CCAS : la ville augmente de nouveau son concours au Val (11,6 M€ en 2025 contre 11,05 M€ en 2024) et à la restauration scolaire pour aider les familles courbevoisiennes (5,7 M€ contre 5,3 M€). La subvention au CCAS est reconduite à l’identique (1,9 M€).
• La sécurité : police municipale et médiation se voient allouer un budget de fonctionnement de 8,1 M€.
• L’entretien des bâtiments communaux : l’enveloppe globale progresse légèrement (5,5 M€ en 2025 contre 5,3 M€ en 2024), dont 1,7 M€ pour la poursuite du contrat de performance énergétique, 600 K€ pour les travaux de sécurité incendie et 600 K€ pour la rénovation des ascenseurs et escalators.
• La voirie : elle se voit attribuer 2,8 M€, dont 1,5 M€ pour le contrat de performance énergétique sur l’éclairage public.
• Les autres contributions à l’entretien et à l’équipement des structures municipales : 2,7 M€ pour l’enseignement, 1,8 M€ pour les espaces verts et l’environnement, 1,5 M€ pour le sport, 1 M€ pour la petite enfance, 750 K€ pour la culture, sans oublier les 2 M€ dévolus au renouvellement de matériels et de mobilier.
« Cette année est inédite à plus d’un titre. En 2025, notre ville doit débourser 11,6 millions d’euros supplémentaires. Des dépenses inattendues et contraintes, imposées par l’État. Heureusement, notre bonne gestion passée permet à Courbevoie d’absorber ce choc brutal à l’heure où les comptes de l’État sont dans le rouge. »
Jacques Kossowski, maire de Courbevoie
Des projets maintenus

Financés à 80 % sur fonds propres et grâce aux subventions sollicitées auprès des partenaires institutionnels de la ville, plusieurs projets structurants verront le jour en cette année 2025, pour une enveloppe totale de 47,1 M€. Des promesses tenues malgré l’accroissement des charges qui pèsent sur le budget.
Le saviez-vous ?
Courbevoie consacrera, en 2025, 12,4 M€ à la poursuite de ses opérations en faveur de la transition écologique et énergique : végétalisation de l’espace public, verdissement du parc automobile, pose de panneaux solaires sur les toitures de bâtiments publics, création d’îlots de fraîcheur dans les cours d’école, équipement de nouveaux établissements en tables de tri connectées pour lutter contre le gaspillage alimentaire.
Trois questions à...

… Patrick Gimonet, adjoint au maire aux finances, et François Muteau, directeur général des services
Quels leviers la municipalité a-t-elle déjà actionnés pour réaliser des économies ?
Patrick Gimonet : L’objectif fixé par le maire est de limiter les dépenses sans compromettre l’excellence du service rendu aux habitants. Dans un contexte budgétaire difficile, l’administration a dû réaliser des efforts inédits. Nous avons été très attentifs à la maîtrise des effectifs. À titre d’illustration, nous sommes passés de 1798 équivalents temps plein en 2020 à 1776 en 2024. Nous sommes parvenus à contenir la hausse du coût des fluides en menant une politique de sobriété énergétique ambitieuse, via un contrat de performance énergétique. Nous opérons également des mutualisations, que cela soit pour les achats ou les événements. Enfin, nous avons renforcé le pôle « ressources financières », chargé de solliciter nos partenaires (région, département, métropole, etc.), dans le cadre du financement de nos programmes d’urbanisme et d’équipement.
Les agents municipaux ont également été mis à contribution. De quelle manière ?
François Muteau : Toute la mairie est mobilisée pour « faire mieux avec moins ». Je tiens d’ailleurs à attirer l’attention des habitants sur l’investissement quotidien de nos agents, dont certains exercent des métiers pénibles dans des conditions difficiles. Ils font preuve d’engagement et de capacités d’adaptation pour s’organiser en fonction des besoins du terrain. Par exemple, nous inaugurons trois espaces verts en 2025 sans embaucher de nouveaux jardiniers. Les équipes et leurs encadrants se mobilisent pour trouver des solutions afin d’assurer leurs missions avec toujours plus d’efficience. Je salue ici leur professionnalisme et leur sens du service public. Paradoxalement, les métiers essentiels sont parfois les moins reconnus. À Courbevoie, nous les valorisons et travaillons à les rendre plus attractifs.
Existe-t-il encore des marges de manoeuvre pour contenir les dépenses de la ville ?
P. G. : En 2024, nous avons entrepris, avec la direction générale des services, une évaluation de nos politiques publiques, afin de renforcer la cohérence et l’efficacité des prestations rendues à la population et d’en optimiser les coûts.
F. M. : L’intensification du dialogue entre les directions, les élus et les services financiers, mais aussi les organisations syndicales et les partenaires institutionnels, nous permet d’ajuster et de rationaliser nos pratiques. Il s’agit d’adopter une culture collective de l’efficience. Ces évolutions, qui préparent l’avenir de Courbevoie, auront une incidence à moyen terme.
Des achats raisonnés
La ville étend ses efforts de sobriété à sa politique d’achat. Ainsi, le service de la commande publique a développé plusieurs actions vouées à rationaliser ses dépenses : enveloppes budgétaires contraintes et établies en fonction de priorités, réflexion et arbitrage quant aux modes de gestion des politiques publiques, comparatifs de coûts et rapports qualité/prix ou encore clauses butoirs dans les contrats permettant d’éviter les effets de révision dus à l’inflation.


Une dette maîtrisée
Bien qu’elle subisse, à l’instar de l’ensemble des collectivités, un « effet ciseaux » (hausse structurelle des dépenses et baisse des recettes), Courbevoie améliore encore, en 2025, sa capacité de désendettement. La ville serait en effet en mesure de rembourser sa dette de 135,6 M€ en moins de 5 ans (contre 7,6 ans en 2014 et 8,2 ans en 2020). Une situation exemplaire au regard de ce que préconise la chambre régionale des comptes – qui a d’ailleurs salué, dans son rapport de 2022, la rigueur avec laquelle les comptes de la collectivité sont tenus. En 2025, la dette de la ville restera stable.

EN RÉSUMÉ
• Le budget primitif 2025 de la ville de Courbevoie s’élève à 335,6 M€, dont 260 M€ en fonctionnement et 75,6 M€ en investissement.
• Malgré la mobilisation du maire, les prélèvements exigés par l’État ont augmenté de 11,6 M€ en 2025. Des dépenses nouvelles et inattendues pour la ville.
• La ville doit également faire face à des augmentations structurelles de ses dépenses locales, dont celle de la masse salariale.
• Grâce à une gestion financière rigoureuse et inventive, la qualité de service rendue aux Courbevoisiens ne sera pas affectée par cette pression financière.
• Il n’y aura pas d’augmentation d’impôts en 2025.